Dernières chances de Ravalomanana

Published on 04/16,2010

Cette analyse est rédigée après l'annonce d’une rencontre possible entre Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana à Johannesbourg prévue le 25 avril prochain. Voici une suite de l'analyse 'Ravalomanana est perdu'.

Les Atouts de Ravalomanana

Tout d'abord étudions les vrais atouts de Ravalomanana et les raisons qui l'ont mis au pouvoir.

C'est un homme très patriote, et très fier de la nation Malagasy. Sa carrière professionnelle illustre bien cela. Mais sa carrière politique est aussi marquée par une forte fierté d’être Malagasy. Les avions Air Force apporte une vraie image d’indépendance de Madagascar aussi chers soient-ils, qu’importe l’idée d’investissements derrière.

Quoiqu'on en dise sur la diablerie ou la sorcellerie de Ravalomana, il est parmi les hommes politiques osant affirmer sa foi. On l'accuse parfois de mélanger l'Etat et la Réligion. Mais notons qu’en Europe, lequel souvent soi-disant le ‘juste’ se base pour les analystes, la position de l’Eglise nécessite souvent l’intervention de l’Etat.

Les erreurs de Ravalomanana

Evincé par Andry Rajoelina et ses équipes, Ravalomanana a commis plusieurs erreurs.

- Fuir : il est clair que dès qu’il est sorti de Madagascar, il est presque impossible pour lui d’y retourner. Actuellement il dit qu’il ne veut pas rentrer afin de sauver des vies. La vérité est que la HAT ne le laisserait pas entrer. Car s’il serait à Madagascar, et qu’il serait jeté en prison, tôt ou tard, il serait libéré. En Honduras, le président déchu a essayé de rentrer par la force mais l’autorité putschiste a empêché l’avion d’atterrir. Nelson Mandela a été emprisonné pendant 27 ans mais il est revenu  au pouvoir et devenu président en 1994. Andry Rajoelina le savait, au moment où il le cherchait, il est resté au pays, et s’est refugié dans l’ambassade de France.

- Légal et légaliste : Une autre grosse erreur de Ravalomanana est alors que tout le peuple était encore avec lui, il a ajouté un argument que peu de malgaches comprennent : le légal. C’est un bon argument pour se faire valoir auprès de la communauté internationale, mais les malgaches ne sont pas sensibles à cela. D’ailleurs tout mouvement populaire réussi débute toujours de l’illégalité : une grève est légale, mais la grève illimitée effectuée en 1992 est illégale. Cet argument d’accuser le pouvoir actuel d’illégal peut s’appliquer même sur le cas de Ravalomanana sachant qu’il s’est auto-proclamé lui aussi.

- Accord de Maputo et Addis Abeba : Arrivé à signer ensemble un accord est bien. Mais l’erreur de Ravalomanana se trouve dans le contenu de cet accord. En gros, l’accord stipule le partage du pouvoir ¼ pour chaque mouvance. Il n’aurait jamais du accepter signer cela pour deux raisons principales : il avait obtenu plus 50% de vote à la dernière élection présidentielle, et le poids réel de la mouvance Andry Rajoelina est encore à prouver. Le pire c’est que Marc Ravalomanana tente encore de revenir sur cet accord alors la chance lui souriait lorsque Andry Rajoelina l’annulait. Actuellement Andry Rajoelina essaie de raviver cet accord, en suggérant à nouveau une rencontre entre les mouvances, car il a réalisé qu’il n’est pas perdant.

- Naïveté : Dans une situation aussi délicate, il faut que Ravalomanana fasse preuve d’intelligence politique, moins de naïveté. Interviewé par le journaliste de la RFI, il insistait sur le fait que les sanctions de l’UA n’est pas symbolique, actuellement Andry Rajoelina est invité en France 14 Juillet prochain. Certes diplômatiquement il ne voulait pas accuser l’Union Africaine de la légèreté de la sanction, mais il y aurait pu contourner la question.

Nouvelles approches

- Accentuer sur le patriotisme. Il est certain que la France appuie Rajoelina. Sans provoquer vers la xénophobie, ou vers l'anti-français, Ravalomanana doit appuyer plus sur un argument patriotique auquel il s’est prouvé doué. Dans son dernier discours il a commencé par parler de réconciliation nationale, mais est resté flou. Il faut qu'il continue à appuyer cette voie.

- Valeur ‘ray aman-dreny'. Par l'accession d’Andry Rajoelina à la tête de l'Etat , un jeune inexpérimenté à la tête d'un pays fondés sur les 'ela netezana vao lavavolo', 'tratra antitra' est inconcevable,  la valeur 'Ray aman-dReny' a été bafouée. L’an dernier, Ravalomanana a eu raison de choisir Manandafy comme premier ministre, il a failli mettre en valeur cette nomination. Les gens pro-Ravalomanana ou pro-Rajoelina ont argumenté son choix : il n'avait plus d'alliés. Mais il aurait pu bien le justifier par l'expérience en politique de Manandafy. Curieusement, Ravalomanana n'attaque jamais cette atteinte de la valeur ‘Ray Aman-dreny’, cette jeunesse, et inexpérience de Andry Rajoelina. On dirait qu'il l'acceptait, ce qui conduit à supposer qu’il trouve légitime la personnalité Andry Rajoelina à la tête de l’Etat, ou pire, Ravalomanana s’identifie-t-il à Andry Rajoelina. Même si les deux protagonistes sont fonceurs, self made man, Ravalomanana doit se distinguer de cette image en valorisant la maturité, la valeur malgache dans le milieu politique.

- Successeur : Ravalomanana ne reviendra plus au pouvoir. Les raisons sont multiples mais par simple logique d'alternance, un président déchu ne pourra pas revenir président. Moralement pour le peuple malgache, même si ce serait justice de faire revenir Ravalomanana, cela conduit à penser que les malgaches ne sont  capables de succéder un bien  – s’il l’on suppose que Ravalomanana est bien -  par un bien.   - La diaspora : Jusqu'ici la diaspora a participé mais l'impact est moindre. Il est vrai que les actions de la diaspora sont à faire avec beaucoup de précautions sachant que c’est un groupe de malgache – peu en nombre – qui se manifestent dans un pays qui n’est pas le sien. Mais il faut que Ravalomanana s'entoure plus d’une équipe de la diaspora, car la diaspora jouit d’une expérience internationale que même Ravalomanana lui-même n’a pas. Il faut qu’il supprime le GTT, et le remette dans TIM, Tiako i Madagascar, son parti politique.

- Transparence : Ravalomanana n’est plus présent physiquement, mais il manque beaucoup aussi de transparence. Des rumeurs circulent qu’il a lancé une entreprise de chocolaterie en Afrique du Sud, il faut qu’il confirme cette rumeur ou qu’il démentisse officiellement dans le cas échéant. Son site officiel 'tiako-madagascar.net' manque beaucoup d’indépendance, presque fanatique. Il faut que son site officiel relate des nouvelles de Madagascar, en donnant ensuite les arguments pro-Ravalomanana seulement si c’est nécessaire.

Ces quelques lignes montrent que Ravalomanana a beaucoup à faire pour pouvoir revenir ou faire revenir son parti TIM majoritaire au pouvoir. Je doute fort qu’il parviendra car il se montre de plus en en plus passif, qui laisse supposer qu’il est découragé, en attendant les actions ou les fautes des autres. Il manque d’initiative personnelle (à pars ses discours), une clarté sur l’identité et la valorisation du TIM. Il faut dire que le temps n’est pas en sa faveur, alors c’est à lui d’agir sur ses dernières chances.

 


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